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La le�on de Musique

 
La leçon de Musique Content : La Leçon de Musique, scène du Barbier de Séville (Rossini)
Victor Hugo aimait-il la musique ?
Franz-Peter Schubert (1797-1828), musicien de Vienne
Franz Peter Schubert, Bicentenaire (1797-1997)
Robert Schumann (1810-1856), musicien de Zwickau
Richard Wagner, musicien de Meudon (1813-1883) & Stéphane Mallarmé
La Canso de Gasto Febus à Frédéric Mistral, «Koïné lyrique» ou «voix d'un peuple»?
Gabriel Fauré (1845-1924) Musicien d'Ariège
Gabriel Fauré, musicien de Verlaine
Le dernier Concert de la Salle Gabriel Fauré
Rachmaninov, musicien d'Ivanovka
Tony Poncet, Ténor (1918-1979)
La Violetta du Siècle
Le chant du cygne (Schubert)
An die Musik (CD1, CD2)
Hommage à Yves Nat (1890 -1956)
Tourgueniev - Gounod - Mireille
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Franz Peter Schubert, Bicentenaire (1797-1997)

 

Prologue

Je vous invite, belles dames et savants messieurs
et tous ceux qui aiment voir et entendre
quelque chose de nouveau,
à écouter un spectacle flambant neuf
et du tout dernier cri...
” (Wilhelm Müller)

Die schöne Müllerin (La Belle Meunière)
D-795 (1823) Franz-Peter Schubert

         Il était une fois un blond garçon-meunier, simple, naïf, ivre de grand air et d’espace, qui tomba amoureux de la jolie fille de ses patrons, une belle demoiselle aux yeux bleus. Le destin leur fixa rendez-vous au bord d’un frais ruisseau, éternel confident, éternel voyageur, au cœur de la verte campagne d’Autriche. L’apprenti-meunier était sincère, la demoiselle, coquette ; elle se montra plus sensible aux appels du cor (“vous appelez cela de l’art !”, disait Schubert à l’un de ces “souffleurs de vent” de l’orchestre de l’Opéra de Vienne) qu’aux frémissements du luth de son amoureux transi. La coquette oubliera donc l’eau de cristal où frétille la truite, l’odeur du foin coupé, la lune et les étoiles, le ciel immense et ce pour mieux tendre le cou vers la grand’ route qui va vers la ville où passe un matamore avec son fusil, tout chargé des dépouilles d’un innocent gibier, provoquant ainsi le geste désespéré du pauvre apprenti-meunier refusé par l’amante de condition socialement supérieure.

         On se rappelle comment — ainsi le veut, du moins, la légende — Franz-Peter Schubert, en visite chez son ami le chanteur Randhartinger, emprunta subrepticement un recueil de poèmes qui traînait sur la table : c’était La Belle Meunière de Wilhelm Müller, poète, spécialiste de philologie, de langues ancien-nes, d’histoire et fervent lecteur de Shakespeare qui, avec ce cycle, voulait retrouver l’esprit du chant popu-laire germanique (Volkslied) tel qu’issu de la lignée des Minnesänger sinon de celle des Troubadours et qui avait beaucoup espéré qu’il se trouverait peut-être un jour quelque âme-sœur pour percevoir les mélodies qui sortent de ses mots afin de les lui mieux rendre.

         On sait comment, le lendemain (en manière d’excuse ?), Schubert se mit au piano devant Randhartinger et lui “chanta de son agréable voix de ténor et en s’accompagnant lui-même”, quelques-unes de ces mélodies fraîches écloses tirées du recueil en question. Le poète et le compositeur ne se rencontrèrent jamais. Qu’aurait donc écrit Müller à Schubert (ou à sa présente chanteuse) s’il avait entendu sa Belle Meunière telle qu’elle nous est ici contée, en une succession de tableautins lyrico-dramatiques, expression spontanée de l’âme germanique sinon de l’âme tout court, par une interprète de nationalité musicienne.

         Mais laissons à celle-ci le soin de — à son tour — s’excuser : “où est l’exploit, nous direz-vous ? Il n’en est pas. Il ne s’agit que d’approcher la création, tant celle du poète que celle du compositeur et, à force d’oubli de soi-même, de les rencontrer l’un et l’autre séparément, puis de concert, dans leur quête d’absolu, tout au bout d’une neuve esthétique où l’instrument se fait voix et la voix instrument ...”

         Même si Schubert avait pleine conscience de ses limites dans l’exécution pianistique (voir à ce propos le Erlkönig du 8 mai 1993, salle Rachmaninov, Moscou, 1re mondiale), même si Müller avouait que ses Lieder n’abou-tissent qu’à une moitié de vie, une vie de papier en noir et blanc jusqu’à ce que la musique les anime ; la nature et l’art qui, selon l’heureuse formule de Goethe, semblaient se fuir, paraissent ici, enfin, se retrouver.

CLAUDE D'ESPLAS - La Leçon de Musique
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